Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique
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Willy Bal

Willy Bal / Photo © Nicole Hellyn Membre belge philologue du 9 novembre 1968 au 18 août 2013.
Prédécesseur : Joseph Calozet
Successeur : Jean Klein
Fauteuil 27

Biographie

Willy Bal est né le 11 août 1916 à Jamioulx. Il restera toujours proche de ses origines rurales. Sa vocation de poète dialectal s’éveille alors qu’il est encore en Humanités. Étudiant en philologie romane, c’est tout naturellement qu’il consacre à la dialectologie son mémoire de licence, puis une thèse de doctorat, tôt achevée et partiellement publiée (Lexique du parler de Jamioulx, 1949).

S’éveille ainsi une double et solide personnalité de théoricien et de praticien. Ce que Bal ne cessera jamais d’être : auteur d’une étude sur le rude métier de bûcheron, n’aura-t-il pas mis préalablement la main à la cognée? D’un côté une œuvre littéraire abondante : principalement poésie (Oupias d’âvri, 1935, Poques èt djârnons, 1957; on rassemblera en 1991 ses Œuvres poétiques wallonnes 1932-1990 et, en 2019, sera encore publié l’émouvant Au dérin cripèt) mais aussi récits en prose (Fauves dèl Tâye-aus-Fréjes èt contes dou Tiène-al-Bije, 1956) et éditions de textes. Sur l’autre versant, un travail linguistique tout de précision (dont témoignent les trois tomes du
Dictionnaire de l’Ouest-wallon, élaboré avec A. Carlier), mais aussi une réflexion sur la culture régionale et sa place dans la culture mondiale. Une réflexion qui ne craint pas de s’exprimer dans la langue du coeur (El région dins l’monde, 1936).

Avec son complice M. Piron, Bal exigera de la poésie wallonne des qualités d’inspiration et de forme à même de la faire dialoguer avec les grandes littératures du monde. D’ailleurs, les expériences qu’il glane dans la littérature dialectale, il les rapproche volontiers d’autres quêtes, comme celles de Péguy, Ramuz et Pourrat, écrivains-frères à qui il consacre plusieurs études. Bien plus : l’intellectuel, à qui sa foi a insufflé le sens de la responsabilité, refuse de s’enfermer dans quelque bois sacré; sa réflexion finira par porter sur l’importance du mouvement régionaliste dans son ensemble (voir La Faillite de 1830? Élie Baussart, «La Terre wallonne» et le mouvement régionaliste, 1973).

La guerre et la captivité marqueront profondément l’homme et l’œuvre. Le premier y sera soumis à l’épreuve de la déchirure, et approfondira ses convictions démocrates; la seconde y gagnera un souffle et une âpreté dont témoigne Au soya dés leus (1947) et le texte majeur qu’est Warum Krieg? (1996), puissant témoignage pacifiste.

D’abord professeur dans l’enseignement secondaire, Bal rejoint l’université en 1956. Ici encore, l’expérience est vécue sur le mode intense : à la jeune Université Lovanium, Bal se met à l’étude du monde neuf qu’est l’Afrique. Il en apprend les langues, mais se penche aussi sur le destin des langues romanes qui y ont provigné, et devient un éminent spécialiste du portugais. En étudiant ces contacts entre cultures, il fait assurément œuvre de pionnier : ce n’est que récemment que la créolistique ou l’étude du français d’Afrique ont connu le développement prodigieux que l’on sait. Ici encore se marient le souci du détail, que Bal tient de sa formation philologique, et les perspectives générales que lui inspire sa personnalité généreuse. D’un côté, un pan important de son œuvre est fait de l’édition de textes historiques africains (Description du royaume de Congo et des contrées environnantes par Filippo Pigafetta et Duarte Lopes, 1963, Le Royaume du Congo aux XVe et XVIe siècles, 1963) ou encore de réflexions étymologiques et lexicologiques (réunies dans Afroromanica Studia, 1979 ou Africa Romanica, 1988). De l’autre, Bal, un des tout premiers, a su affirmer à ceux qui se soucient de la vie du français que l’avenir de cette langue est en Afrique, et que seul le développement, dans le respect de l’autre, le garantira. Thèse qui vertèbre le recueil Enjeux et atouts du français en Afrique noire, édité par J. Germain en 2014.

Homme de progrès dans le monde, Bal l’est aussi dans les disciplines qui sont les siennes : il a tôt vu l’intérêt qu’il y avait à appliquer la perspective structuraliste aux études dialectales. Mais il est aussi homme de synthèse, comme l’a montré la publication de Limes I (1992). Bal a ainsi su prendre la mesure de tous les acquis de la linguistique romane traditionnelle, cadastrée dans une Introduction aux études de linguistique romane (1966) et dans un Guide bibliographique de linguistique romane (1978; avec J. Germain), suivi d’une Bibliographie sélective de linguistique romane et française (1991; avec J. Germain, J. Klein, P. Swiggers). Mais chez lui, la synthèse est toujours critique. On le voit ainsi militer pour une linguistique humaniste, entendant ne jamais couper la langue de ses déterminations sociales et historiques. En pleine ère formaliste, il est un des premiers en Belgique à réclamer une place pour la sociolinguistique.

En 1965 en effet, Bal rentre dans son pays, à l’Université de Louvain. Membre de la Commission royale de toponymie et de dialectologie, et de la Société de langue et de littérature wallonnes, il est élu le 9 novembre 1968 à l’Académie royale de langue et de littérature françaises. Membre du Conseil international de la langue française, il l’est aussi du Conseil des langues régionales endogènes de la Communauté française de Belgique.

La fidélité aux origines va parfois de pair avec le repli sur des traditions sclérosées et avec le refus de l’autre : l’autre dans l’espace — l’étranger —, et l’autre dans le temps : l’histoire. Willy Bal fait assurément mentir ce poncif, lui dont la robuste stature évoque le géant Antée, qui reprenait force chaque fois qu’il touchait cette terre dont il était issu : mieux que tout autre, il a montré par sa vie et son œuvre qu’on ne pouvait vraiment être du monde qu’en étant d’un lieu et d’un temps, et, qu’en échange, l’approfondissement de ce que l’on est ouvre à tout l’homme. Si l’œuvre de Bal est un hymne à la verdeur du terroir, le mot de nostalgie convient donc mal pour décrire une pensée exigeante, toujours tendue vers l’avenir.

Willy Bal s’est éteint le 18 août 2013 dans sa maison natale.

– Jean-Marie Klinkenberg

Bibliographie

  • Oupias d'âvri, poésie, Louvain, Rex, 1933; Liège, La Vie wallonne, 1935.
  • Trwès contes, contes, Charleroi, Èl Chariguète, 1938.
  • Au soya dès leus, poésie, Namur, Les Cahiers wallons, 1947.
  • Il-aveut pôrtè l'soya dins s'bèsace, nouvelle, Namur, Les Cahiers wallons, 1951.
  • Henri Pourrat, essayiste, essai, Anvers, De Nederlandsche Boekhandel, 1954.
  • Fauves dèl Tâye-aus-fréjes èt contes dou Tiène-al-bîje, contes, Liège, Société de Langue et de Littérature wallonnes, 1956.
  • Poques èt djârnons, poésie, Charleroi, Éditions Le Bourdon, 1957.
  • La comparaison, son emploi dans «Gaspard des montagnes» d'Henri Pourrat, Léopoldville, Éditions de l'Université, 1958.
  • Fauves wallonnes, de Paulin Brogneaux, édition de texte, Charleroi, Édition de l'Association royale littéraire wallonne, 1960.
  • Le royaume du Congo aux XVIe et XVIIe siècles, documents d'histoire, Léopoldville, Institut national d'études politiques, 1963.
  • Témoignage d'un écrivain employant le patois comme langue littéraire, essai, Louvain, Centre international de dialectologie générale, 1964.
  • Description du royaume de Congo et des contrées environnantes, Filippo Pigafetta & Duarte Lopes (1591) ; traduit de l'italien et annotée par Willy Bal, Louvain, Éditions Nauwelaerts / Paris, Béatrice-Nauwelaerts, 1965.
  • Introduction aux études de linguistique romane, avec considération spéciale de la linguistique française, essai, Paris, Didier, 1966.
  • La faillite de 1830? Èlie Baussart, La Terre wallonne et le mouvement régionaliste, essai, Bruxelles, Vie ouvrière, 1973.
  • «Poésie dialectale de Wallonie», in Témoins de Wallonie, essai, Louvain, Université catholique de Louvain-C.A.C.E.F.-Conseil culturel, 1974.
  • Guide bibliographique de linguistique romane (avec Jean Germain), Louvain, Peeters, 1978.
  • Introduction à l'inventaire des particularités lexicales du français en Afrique noire, essai, Montréal, AUPELF, 1983.
  • Dictionnaire de l'Ouest-wallon (avec Arille Carlier), ouvrage scientifique (3 t.), Charleroi, Association littéraire wallonne de Charleroi, 1985.
  • Bibliographie sélective de linguistique romane et française (avec Jean Germain, Jean Klein et Pierre Swiggers), Paris / Louvain-la-Neuve, Duculot, 1991.
  • Œuvres poétiques wallonnes 1932-1990, Association littéraire wallonne de Charleroi et Société de langue et de littérature wallonnes, 1991.
  • Warum Krieg!, récit en prose illustré par Gustave Marchoul, Charleroi, El Bourdon, 1996.
  • Djonnèsse a Malvô, recueil de contes, avec une traduction française de Jean-Luc Fauconnier, dessins de Raymond Drygalski, Charleroi, El Bourdon, 2001.
  • Le Royaume de Congo et les contrées environnantes (1591), présenté, traduit et annoté par Willy Bal, Chandeigne/Unesco, Paris, 2002

Bibliographie critique

  • Langues et cultures. Mélanges offerts à Willy Bal, Louvain-la-Neuve, Cahiers de l'Institut de linguistique de Louvain, 1984.

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